Wikipédia:Comité Québec/Forum mondial des sciences sociales de Montréal

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À l’occasion de la tenue du Forum Mondial des Sciences Sociales à Montréal, des membres du Comité Québec de Wikipédia et les membres fondateurs du site éducatifs sans but lucratif Les Classiques des sciences sociales ont souhaité promouvoir la discussion autour du thème de l’ouverture internationale de l’offre numérique de savoir francophone.

Intitulé "Culture libre et francophonie : diversité ou occidentalocentrisme ?", le panel a eu lieu le dimanche 13 octobre 2013 de 13:00 à 14:45 au Palais des Congrès de Montréal. Il était organisé par Seeris (Nathalie Casemajor) et Emilie Tremblay, doctorante en sociologie à l'UQAM). Trois wikimédiens étaient présents : Seeris (d · c)(animation du panel), Simon Villeneuve (d · c) (présentateur) et Benoit Rochon (d · c) (public).

Le Forum mondial des sciences sociales[modifier le code]

Le Conseil international des sciences sociales (CISS), appuyé par un consortium mené par le secrétariat de l’Association internationale de science politique, a tenu son deuxième Forum mondial des sciences sociales à Montréal, du 13 au 15 octobre 2013.

Les Forums mondiaux des sciences sociales sont une plateforme interdisciplinaire et interrégionale d’échanges sur les nouvelles approches des problèmes et enjeux globaux.

Placé sous le thème « Transformations sociales et ère numérique », le Forum mondial a réuni à Montréal des sommités internationales et près d'un millier de participants d'environ 80 pays, pour discuter des derniers développements de la recherche sur les impacts sociaux des technologies numériques.

Thème du panel[modifier le code]

Quelle est la place du contenu non-occidental sur les plates-formes de savoir libre ? Comment développer des partenariats avec des contributeurs, initiatives existantes ou en émergence dans d'autres parties du monde francophone pour avoir un meilleur portrait de la production scientifique en sciences sociales en dehors de l'Occident et pour la rendre davantage accessible sur les plateformes francophones ?

Suscitant les échanges entre intervenants professionnels et chercheurs, ce panel a soulevé les questions de la diversité dans la diffusion des savoirs savants, de l’état des infrastructures de communication dans les pays dits en développement, de l’appropriation des technologies de l’information et de la communication, de la visibilité des productions savantes non-occidentales sur la Toile et des hiérarchies et inégalités dans la diffusion des savoirs en sciences sociales.

Intervenants[modifier le code]

  • Émilie Tremblay et Jean-Marie Tremblay – Fondateurs du site Les classiques des sciences sociales. "Auteurs non-occidentaux dans la bibliothèque numérique francophone Les Classiques des sciences sociales : situation actuelle et défis"
  • Simon Villeneuve – Membre du Comité Québec de Wikipédia. "Quelle place pour les contributeurs et ouvrages non-occidentaux dans les projets libres de la Wikimedia Foundation ?"
  • Florence Piron – Professeure titulaire, Département d’information et de communication de l'Université Laval "Le défi de l'accès aux ressources scientifiques libres en Haïti: quelques observations et un projet"
  • Diéyi Diouf – Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD). "Enjeux de la visibilité des résultats de recherche à l’Université cheikh Anta Diop de Dakar : un défi à relever".
  • Oumar Kane - Professeur, Université du Québec à Montréal. Pistes de synthèse du panel. "Dynamiques institutionnelles et sociotechnique de la recherche en sciences sociales. De quelques enjeux récents en Afrique francophone"

Organisation : Nathalie Casemajor (Seeris), chercheure postdoctorante à l'INRS (Centre Urbanisation, Culture et Société) Émilie Tremblay, doctorante en sociologie, UQÀM

Apport des participants[modifier le code]

Note : ajouter les powerpoints et détails

"Auteurs non-occidentaux dans la bibliothèque numérique francophone Les Classiques des sciences sociales : situation actuelle et défis"[modifier le code]

Les technologies de l’information et de la communication ont permis d’accroître l’accès et la circulation des savoirs savants. Les nombreuses initiatives et pratiques de la science ouverte dans différentes régions du monde contribuent à donner un accès libre aux publications scientifiques. Les plateformes de revues et collections de livres, les dépôts institutionnels et les archives ouvertes de même que les bibliothèques numériques en sont des exemples. Or, le développement du numérique et la science ouverte favorisent-ils la diffusion et l’accès aux savoirs savants produits en dehors de l’Occident ? Certaines « grandes » bases de données bibliographiques comme le Social Science Citation Index (SSCI), par exemple, sous-représentent les travaux scientifiques produits en dehors de l’Occident et en langue française (Keim, 2010 ; Mouton, 2010 ; Archambault et Larivière, 2010). Cette production est-elle davantage visible dans les bibliothèques numériques ? La bibliothèque numérique francophone Les Classiques des sciences sociales s’est justement donnée pour mission, notamment de contribuer à faire connaître les travaux de chercheurs québécois et de chercheurs originaires de la francophonie. Elle diffuse gratuitement plus de 5500 œuvres contemporaines et classiques – articles de revues, livres, chapitres d’ouvrage, etc. Actuellement, les publications de chercheurs québécois et français y sont prédominantes. Ce qui nous amène à poser la question : comment valoriser un ensemble de savoirs nationaux tout en s’ouvrant au pluralisme des savoirs ? Dans cette communication, nous présenterons les statistiques à la fois des auteurs diffusés, des téléchargements et des consultations par pays. Nous nous pencherons sur les difficultés rencontrées dans la diffusion de la production scientifique élaborée en dehors de l’Occident. Nous réfléchirons également aux partenariats qu’il est possible d’envisager pour donner un plus grand accès aux auteurs et aux ouvrages non-occidentaux.

"Quelle place pour les contributeurs et ouvrages non-occidentaux dans les projets libres de la Wikimedia Foundation ?"[modifier le code]

La Wikimedia Foundation héberge 12 projets liés à la culture libre dont Wikipédia est le projet phare. Ces projets sont développés sur des wikis publics, c'est-à-dire sur des sites web qui peuvent être modifiés par n'importe quel internaute sans qu'aucune inscription ne soit nécessaire.Lors de cette présentation, nous montrerons, notamment à l'aide de la géolocalisation de certains articles, que non seulement la Wikipédia en français est occidentalocentrée, mais également francocentrée, i. e. qu'elle met en avant de façon exagérée la manière de penser française ou ce qui concerne la France. Nous montrerons également que de par leur nature même, d'autres projets de la Wikimedia Foundation, tels Wikimedia Commons, Wikinews et Wiktionnaire, semblent plus faciles d'accès aux cultures non-occidentales.Vous pouvez avoir un aperçu plus détaillé de la présentation à la page suivante : http://meta.wikimedia.org/wiki/WSSF2013

Enjeux de la visibilité des résultats de recherche à l’Université cheikh Anta Diop de Dakar : un défi à relever"[modifier le code]

Dans les pays en développement, particulièrement en Afrique francophone subsaharienne, la recherche bute plus sur une barrière financière qui, finalement, constitue un frein supplémentaire à la publication des résultats de recherche. L’Université cheikh Anta Diop de Dakar n’a pas dérogé à la règle. En effet, les chercheurs africains sont souvent confrontés à de réelles difficultés d'édition et de diffusion de leurs travaux dont les causes sont la rareté des revues dites « cotées » ou l’irrégularité de leur parution. A ce sujet, nous convenons avec J. P. Diouf « qu’en Afrique, se voir publier relève du parcours du combattant » (Diouf, 2006) . Pourtant, tous les secteurs de la vie active doivent bien fonctionner, surtout en corrélation avec ce qui se passe à travers le monde car, avec le développement des Technologies de l’information et de la communication (TIC), aucune université, aucun pays ou continent ne peut prendre le risque de vivre en vase clos. Pour toutes ces raisons et face aux ressources limitées dans l’enseignement supérieur, il semble que les opportunités offertes par les TIC, particulièrement l'édition électronique vient à point nommé et constitue une excellente pratique pour amoindrir les difficultés de communication en général, de publication, d’accès et de partage de l’information en particulier que rencontrent les chercheurs du Sud. Cette étude se propose de décrypter les réels enjeux de la visibilité des résultats de recherche à l’Université cheikh Anta Diop de Dakar.

Pistes de synthèse du panel[modifier le code]

La production scientifique postcoloniale africaine s’est très tôt inscrite dans le cadre d’une coopération scientifique qui consistait à produire un savoir extraverti et qui reconduisait les lignes de force du partage colonial. Les dynamiques se sont complexifiées en fonction des aires géographiques et des spécificités nationales mais le constat d’une production et d’une diffusion lacunaires de la recherche scientifique sur le continent africain demeure encore globalement d’actualité. Cela étant dit, le développement des plates-formes numériques et la disponibilité accrue des ressources documentaires sont des facteurs importants dont il faut tenir compte, même si leur impact est davantage attesté en Afrique anglophone qu’en francophonie africaine pour autant que cette partition linguistique soit pertinente. Dans le cadre de cette intervention, nous discuterons des impacts globaux de la diffusion des technologies numériques pour la recherche francophone en sciences sociales et nous tenterons de faire état des dynamiques institutionnelles et sociotechniques qui structurent la recherche tant en termes de production qu’en ce qui concerne la diffusion et la disponibilité des ressources documentaires pour les chercheurs francophones africains.

Bilan des discussions et enjeux pour les projets Wikimédia[modifier le code]

Les discussions ont permis de pointer le lien entre la sous-représentation des savoirs non-occidentaux dans les sources "de qualité" et la sous-représentation de ces mêmes savoirs dans les projets Wikimedia. Si les chercheurs et spécialistes non-occidentaux n'ont pas accès aux plates-formes de publication reconnues pour leur qualité (revues savantes, journaux, magasines spécialisés), cela ne produit-il pas un manque de sources de qualité à citer pour les wikimédiens ? Cela ne contribue-t-il pas à reproduire dans les projets wikimédia une asymétrie des savoirs, liée à des inégalités économiques, sociales et éducatives ? Par ailleurs, le faible taux des contributeurs francophones non-occidentaux dans les projets wikimédia est lié aux mêmes obstacles économiques, sociaux et éducatifs, et contribue également à renforcer la sous-représentation des contenus non-occidentaux.

Les défis à la production et à la diffusion de savoir libre sous forme numérique sont multiples. Si dans les pays occidentaux, l'enjeu de la propriété intellectuelle des productions savantes et de l'édition scientifique ouverte est au coeur des débats, les pays en développement font face à de plus grands obstacles.

Un premier obstacle est l'existence d'inégalités dans l'usage et l'accès aux technologies de l'information et de la communication (TIC), appelée fracture numérique. Dans les régions les plus pauvres, lorsque les réseaux électriques sont vétustes, le courant n'est disponible que quelques heures par jour. Les populations n'ont pas toujours accès à des infrastructures de télécommunication permettant de se connecter à internet, et le prix des abonnements et des équipements informatiques n'est pas accessible pour un grand nombre. Par ailleurs, les universités des pays en développement disposent de budgets bien moins élevés que leurs consoeurs occidentales, et ne peuvent financer qu'une part limitée des infrastructures et équipements nécessaires à la recherche scientifique et à la publication dans des revues reconnues comme sources de qualité.

L'analphabétisme, l'anaphabétisme fonctionnel et l'illectronisme sont d'autres défis de taille, même dans les pays occidentaux. Au Québec par exemple, 49 % de la population a des difficultés de lecture[1]. Au-delà des problème d'alphabétisation, l'utilisation des outils informatiques demande un apprentissage, tout comme la recherche d'information sur internet. Ces apprentissages ne vont pas de soi, et le manque de connaissance nécessaires à l’utilisation des ressources électroniques est un obstacle à la création et à la diffusion de savoir.

Un autre enjeu tient aux critères de valorisation et de légitimation des savoirs. Les savoirs traditionnels et les savoirs oraux des cultures non-occidentales ne sont pas toujours pris en compte dans les mouvements pour le savoir libre. Dans le domaine scientifique, les universités des pays en développement ont rarement les moyens d'assurer la visibilité de leurs recherches dans les revues académiques consacrées. Par conséquent, si les savoirs non-occidentaux sont sous-représentés dans les sources dites "de qualité", les wikimédiens auront moins de contenus non-occidentaux à citer dans l'encyclopédie. Ainsi, les plates-formes de savoir libre contribuent à reproduire des inégalités et des rapports asymétriques qui perdurent depuis l'époque coloniale. Déjà en 1980, le Rapport McBride présenté à l'UNESCO soulignait ces inégalités au sujet de l'accès à l'information et aux médias dans les pays occidentaux et non-occidentaux.

Pistes à développer :

  • Comment poursuivre ces réflexions dans le contexte québécois en travaillant à une meilleure visibilité des savoirs et cultures autochtones ? Quels sont les partenariats qui permettraient de réduire ces inégalités ? Comment le Comité Québec peut-il agir sur ces questions, par exemple en faisant de ce thème un sujet d'intérêt dans les espaces de discussion des différents projets, et dans les événements de la communauté ?
  • Comment augmenter le nombre de contributeurs francophones non-occidentaux ? Les partenariats tissés entre des universités québécoises et des universités dans les pays en développement (voir par exemple le projet de Florence Piron en Haïti) ne sont-ils pas l'occasion de former des étudiants à l'utilisation des plates-formes wikimédia et à la contribution ?
  • Comment augmenter la circulation des contenus entre plates-formes de savoir libre académiques et projets wikimédia ? Comment penser cette circulation non pas comme unidirectionnelle (des plates-formes académiques vers les projets wikimedia), mais comme bidirectionnelle (dans les deux sens) ?

Participation du public[modifier le code]

Le Forum ayant programmé notre panel un dimanche après-midi ensoleillé en plein la fin de semaine de l'action de Grâce, le contexte n'était pas favorable réunir les foules. Les liens tissés entre les intervenants pendant et avant le panel, lors d'un dîner convivial, ont donné lieu à des échanges riches et des occasions de découverte mutuelle.

Dans le public, nous avons eu la présence de Marin Dacos, ingénieur de recherches au CNRS et Directeur du Centre pour l'édition électronique ouverte (Cléo), qui est un acteur clé du savoir libre en France, et qui a activement participé aux discussions.

Contacts et partenariats[modifier le code]

Prise de contact avec Marin Dacos, fondateur de Revues​.org, Calenda, Ope­nE­di­tion et Ope­nE­di­tion Books. Il a co-​fondé Lodel, logi­ciel d’édition électronique.

Prise de contact avec Florence Piron (Benoît ?)

Prise de contact avec Dieyi Diouf

Renforcement des liens avec Les Classiques des sciences sociales.

Enrichissement des contenus de Wikipédia[modifier le code]

Seeris a utilisé les informations débattues lors du panel pour compléter les articles suivants dans Wikipédia :

  • Savoir libre : réorganisation de l'introduction et compléments + ajout des sections "Le mouvement d'Accès au Savoir (A2K)" et "Défis dans le monde occidental et non-occidental" (+4738)
  • Accès libre : Premières informations dans la section "accès ouvert au Québec" (+548)‎
  • Libre accès : ajout d'une référence

Références[modifier le code]

  1. Hélène Roulot-Ganzmann, "L'analphabétisme au Québec - Un fléau pour toute la société", Le Devoir, 3 septembre 2011